Eschaton
Je commence par vous laisser le résumé de ce livre très prenant bien que différent de ceux que j’ai lus de l’auteur :
Casey est un compositeur de musiques de films célèbre, confortablement installé dans sa villa sur les hauteurs de Hollywood. Ayant perdu ses parents, des climatologues faisant partie des derniers à s’être battus pour empêcher la catastrophe, il est comme les autres, profitant des bienfaits d’une existence certes agréable, mais qu’il sait condamnée. À sa propre surprise, il se retrouve contacté par un homme qui prétend connaître la date exacte de la fin du monde, et qui parle d’un programme lancé pour permettre à notre civilisation d’y survivre. Un monde virtuel dans lequel seront copiés les personnalités de tous les plus grands scientifiques et artistes vivants, et duquel ils pourront sortir des siècles plus tard, lorsque la planète sera à nouveau habitable. Pour résumer : lui mourra bien le jour de l’Eschaton, du jugement dernier, mais sa copie digitale lui survivra. N’ayant rien à perdre, il accepte.
Tout bascule lorsque peu après, il tombe amoureux d’Eve, une brillante journaliste. L’idée qu’une partie de lui puisse survivre sans elle devient insupportable. Le couple va alors s’élancer dans une enquête à travers les Etats-Unis, sur fond de fin du monde climatique, afin de localiser le site du programme et en convaincre les responsables d’intégrer Eve.
J’ai eu l’occasion de découvrir l’auteur à travers sa saga Outsphere, dont le prochain est attendu pour cette année 😉 Il a cette tendance et surtout cette capacité à changer de style et d’univers de façon vraiment intéressante. On gardera régulièrement cette notion de futur potentiel, mais c’est bien la seule chose que je retrouve dans ce dernier, et c’est un plaisir notable : finis les combats sur une autre planète, les combats dans un autre monde… nous laissons place ici à une histoire à part, émouvante et prenante du début à la fin.
Ce livre plutôt court se lit vite et bien. Ici, nous suivons des protagonistes qui tentent de rester unis après l’Effondrement prévus par les scientifiques. Car oui, nous aurions la possibilité de survivre au grand chaos en infiltrant un programme informatique durant un temps donné, le temps que la Terre redevienne viable. Nous avons là un récit qui traite plusieurs thèmes de façon plus ou moins élaborée. L’écologie, les relations humaines, la technologie et les avancées qui permettraient de nous sortir de l’enfer que nous nous sommes nous-mêmes créé… Des questions éthiques sont de même amenées sur le plateau. En somme, de nombreuses réflexions (mais jamais moralisatrices) viennent bercer le récit.
Comme le résumé explique relativement bien l’intrigue, on ne va pas revenir sur cette dernière, si ce n’est pour dire qu’elle est bien ficelée. Les protagonistes tiennent la route, ils sont touchants et plein d’entrain. Les dialogues donnent une vraie dimension à la narration, rythmée et sans temps morts. L’histoire en elle-même est pleine de bonnes intentions et fait écho aux « traumatismes » que nous vivons actuellement, elle fait sens et nous n’avons pas trop de mal à nous identifier aux personnage (même si le transfert dans un programme informatique paraît somme toute étrange). Il s’agit d’un artiste qui comprend que sa fin est proche, mais pas seulement la sienne, celle de toute l’humanité. Celle que l’Homme a semée petit à petit… Du coup, c’est au pied du mur qu’on se retrouve, et c’est de là que part l’intrigue, de cette Terre qui se meurt, des ses hommes qui n’ont mis que trop de temps, malgré les signes, à comprendre l’enjeu. On parlera de l’instinct de survie de l’espèce. Tout ça est traité sur une toile de fond qui fait du bien : une trame où l’on se rend compte que c’est bientôt la fin, que quels que soient nos choix, il ne reste que quelques mois, voire semaines, pour nous trouver un but, une cause, une sens à l’existence, et ce, sous couvert d’une relation amoureuse, celle de Casey et Eve.
Moi qui n’aime pas spécialement les romances, celle-ci est loin de m’avoir dérangée. Elle est vraiment en fond, comme si elle nous montrait que, l’air de rien, nous ne sommes rien sans l’autre, que même la personne la plus aigrie devra trouver un compagnon ou une compagne pour échanger. On se rend compte que cette idylle ici aurait pu être une amitié, une relation de partage sur les différences et les inquiétudes propres à chacun d’entre nous. Du coup, il y a dans ces quelques pages une ode à la vie, à l’après éventuel et une invitation au questionnement.
La plume fluide, sans fioritures, nous fait avaler les pages tout en nous invitant au voyage : comme à son habitude, l’auteur est très « cinématographique » dans ses descriptions. Il n’y en a pas des tonnes, mais elles font mouche à chaque fois et nous n’avons aucun mal à imaginer la situation. Avec les dérèglements climatiques que nous voyons depuis maintenant plusieurs années, on ne peut qu’être touché par ce récit. Quelle que soit notre façon de penser ou de s’expliquer la chose, il est des faits que personne ne peut renier, alors la porte est ouverte à la réflexion.
Les petits clin d’œil faits à notre ingénieur mondialement connu, à côté duquel vous ne pouvez pas passer pendant la lecture, sont vraiment sympathiques. Je me suis retrouvée du coup à me demander, et ce à plusieurs reprises, si l’auteur n’avait pas donné un peu de lui à son personnage, Casey. Question qui reste en suspens, mais qui là aussi m’a fait sourire.
En gros, que retenir de ces 230 pages ?
Une plume fluide et simple, un récit dynamique et très visuel, une intrigue prenante et qui nous emmène à nous questionner.
Des personnages intéressants, bien pensés, et amenés de manière adroite et touchante.
Des dialogues qui ne s’essoufflent pas et qui laissent la porte ouverte sur nombre de réflexions.
On reste sur le fil tout du long entre le « framework » (programme informatique) et le monde réel en plein déchéance.
Un futur pas si lointain qui nous fait nous sentir concernés par les événements qui s’y déroulent…
Pas mal de bon, me direz-vous donc 😉
Un one-shot de l’auteur, de loin mon préféré d’ailleurs. Là où Backup ne m’avait pas emballée, où Virtual Revolution 2046 m’avait transportée par son animation et son action, nous retrouvons ici un mélange de tendre, d’action, d’idées, de « pronostics » vraiment sympa, un melting pot dans lequel beaucoup trouveront de quoi satisfaire leurs envies lectures. Il a su combler les attentes que j’avais vis à vis de l’auteur et m’a fait passer un très bon moment de lecture 😉
Je vous en souhaite tout autant 😉