Pour autrui
Fini l’ouvrage de Virginie Fyl, Pour autrui. Un livre plein de bon sens, de bons sentiments aussi, mais surtout, plein de vérité. Cruellement sincère, parfois drôle, parfois triste, il souffle le chaud et le froid : comme la vie !
Je vous laisse là le synopsis :
Son frère et son beau-frère rêvent d’avoir un enfant, mais c’est compliqué pour un couple d’hommes. Dans le même temps, son mari refuse de faire le petit troisième qui, croit-elle, redonnerait un sens à sa vie. Alors pourquoi Sophie ne porterait-elle pas le bébé de son frère ?
Bravant les réticences de sa famille conservatrice, la froide résistance de son mari et le scepticisme de son employeur et de ses enfants, Sophie va se lancer dans cette aventure de « tante porteuse », un chemin de neuf mois jalonné de moments cocasses, de révélations et de quête de sens. Comment sauver sa propre famille quand on aide les autres à construire la leur ?
Alors quoi ? Vous parler de l’histoire en elle-même serait un peu se « foutre de votre gueule » : je crois que le résumé est clair. En revanche, ce qui m’a profondément touchée et que je trouve vraiment intéressant, c’est tous les sujets qu’elle aborde, toutes les vérités qu’elle dénonce, et tout ça avec légèreté et ton accessible.
Dans un premier temps, l’écriture. Elle est fluide, simple et extrêmement bien rythmée. Tout du long, on évolue aux cotés de Sophie, la protagoniste. On plonge dans ses doutes, on appuie ses certitudes, on assume ses choix… Tantôt avec finesse, tantôt avec dureté, les thèmes choisis sont abordés avec brio, par une approche juste et des mots choisis avec soin. Jamais l’autrice ne nous noie dans un monticule trop poète ou trop vulgaire : ça tombe juste pour une femme actuelle qui est préoccupée par des situations (malheureusement) toujours actuelles aussi.
Les dialogues renforcent un peu plus cette impression de « vivant ». Pour ma part, quand deux personnes échangeaient dans ce livre, je me suis sentie impliquée : j’aurais pu être au milieu de ces gens, de ces échanges et donner mon avis sur la question. A chacun de ces derniers, les deux points de vue étaient donnés, même si on sent quand même vers lequel le livre penche.
Bref, l’écriture est très visuelle : les interactions priment largement sur les descriptions, on n’y va pas par quatre chemins et les sujets tombent, se recoupent, s’emmêlent de façon simple et prenante.
Du coup, quels sont-ils ces thèmes ? Nous avons bien évidemment le principal, la GPA et l’homosexualité. Traité soigneusement avec la situation en France et les différentes options qui se présentent aujourd’hui aux couples concernés.
En revanche, nous avons aussi une approche sur la religion, le fait qu’encore quelquefois celle-ci est bien présente et qu’elle est souvent confondue avec la politique dans un pays qui se proclame cependant laïque. Nous avons donc un point fort ici, la chrétienté qui l’emporte et reste l’excuse à certaines personnes se disant bien pensantes, allant se montrer dans les rues pour décider du destin des autres, des contre nature.
Quoi d’autre ? Un autre sujet d’actualité dans lequel beaucoup se retrouveront : la charge mentale. Sujet qui touche de près notre société où tout va vite et où on ne prend plus vraiment le temps de rien. Un enjeu qui en fait plier plus d’un, une source de mal-être via laquelle, parfois, on ne se reconnaît plus, on perd patience ou encore foi en ce que nous faisons ou en ce que nous voudrions faire.
Nous avons aussi le sujet de la parentalité, pas celle d’un nourrisson à venir, mais celle d’un couple déjà parent de deux enfants, des bonheurs comme des tragédies qui peuvent en découler. Des douleurs enfantines, adolescentes, aux douleurs de parents désarmés, tout y passe.
Enfin, on voit aussi passer le sujet de la femme, du sexisme, du machisme dans son intégralité. Une personne affirmée et heureuse qui devient effacée et en crise de prise de conscience sur qui elle est et ce qu’elle veut. Une femme en manque de « pouponnage » qui va trahir et culpabiliser avant de se rendre compte qu’on l’a peut-être bien trahie avant.
Bien évidemment, tous ces thèmes ne sont pas traités en profondeur, pas poussés au paroxysme, mais il faudrait bien plus d’un roman pour faire le point dessus. Du coup, même si ce n’est que touché du doigt par l’autrice, c’est au lecteur de travailler un peu et de le toucher du poing, lui. Les dénonciations faites dans ce petit ouvrage qui se lit vite en laissant un goût amer : le traitement de tout ça est fait en finesse, avec délicatesse.
En bref, vous l’aurez compris, c’est un sujet actuel traité de façon actuelle, avec une écriture et des propos tempérés mais somme toute percutants. L’humour dans la narration étant très présent, il rend léger un fond lourd de sens.
Le livre se lit vite, bien (très bien), fait passer par beaucoup de sentiments et se ferme sur une fin ouverte. Là encore, libre au lecteur de savoir ce que fait Sophie et comment elle compte prendre sa vie en main !
Alors oui, il y a quelques petites bafouilles, mais rien de gênant dans la lecture qui quant à elle, est un véritable plaisir, un coup de pied dans la fourmilière sans leçon de morale, juste un constat bravant les tabous du moment… Bref, un délice.
Pour un premier roman, l’autrice met la barre haute, avec un style léger et plein de contrastes, elle nous offre une histoire contemporaine sans en faire trop, sans tomber dans le mièvre ni le morbide. Du coup, c’est un grand merci que j’adresse à Virginie Fyl pour sa confiance et j’ai hâte de découvrir ce qu’elle a d’autre à nous proposer : plume à suivre !