Les sept jours du talion
Je ne viens pas aujourd’hui vous parler d’une lecture récente mais d’un livre que j’ai parcouru il y a maintenant plusieurs années et que j’ai eu du mal à finir de par sa violence et sa dureté.
J’ai eu l’occasion aujourd’hui même de voir son adaptation cinématographique et j’ai voulu me replonger dans cette histoire peu banale qui ne vous laisse pas indemne et dont j’ai retourné les pages.
Tout d’abord, son résumé :
Il s’appelle Bruno Hamel, il a trente-huit ans et il est chirurgien. Avec sa petite famille – Sylvie, sa conjointe, et Jasmine, sa fille de sept ans -, il habite Drummondville et, comme tous les gens heureux, il n’a pas vraiment d’histoire. Jusqu’à ce que Jasmine, par un bel après-midi d’automne, soit violée et assassinée. Dès lors, l’univers de la famille Hamel bascule.
Mais lorsque la police arrête le meurtrier, un terrible projet germe dans l’esprit enténébré de Bruno : il va s’emparer du monstre et lui faire payer ce qu’il a fait à sa petite fille.
Le jour de la comparution du meurtrier, Hamel, qui a minutieusement préparé son coup, kidnappe le monstre, puis transmet aux autorités policières un message laconique : celui qui a violé et tué sa petite tille va souffrir pendant sept jours, après quoi il sera exécuté. Ensuite seulement, lui-même se rendra.
Alors voilà, nous avons ici, en dehors de la violence à l’état pur motivée par une soif de vengeance et une colère inouïe, les différentes façons d’aborder le deuil. Attention, pas n’importe quel deuil, car on ne parle pas ici de quelqu’un décédé naturellement ou d’une maladie. On parle d’un viol, d’une mort atroce et violente. D’une jeune fille qui débute juste sa vie à qui on arrache tout espoir de vieillir. Au delà du doute, de l’injustice et de la volonté de vengeance (comme son nom l’indique), nous avons dans cet écrit une incision, une faille qui s’ouvre. Qu’est-ce qu’on ferait ? Quelle serait notre réaction face à un meurtrier, d’autant plus s’il est celui de notre propre sang ? Jusqu’où serions-nous capables d’aller ?
Nous sommes au milieu de plusieurs points de vue : celui de l’inspecteur qui essaye de retrouver Hamel avant qu’il ne soit trop tard, celui de l’assassin qui n’a d’autre choix que de « subir » la sentence annoncée par le protagoniste et celui de Hamel, lui-même, qui se laisse tellement déborder par son ressentiment qu’on est déchiré entre la compassion et le dégoût. Partagé entre culpabilité et envie de « rendre hommage » à sa fille, on sent très vite les dualités dans l’intériorité du personnage. Pour ça en tout cas, ce livre est exceptionnel. Si vous avez le cœur accroché, foncez ! L’intrigue en huis-clos et les différentes perceptions du bien et du mal en toile de fond sont bien menées. Attendez-vous cependant à vous poser des questions. La tension et le suspense sont au rendez-vous… tout ça tout ça. Même si le récit est extrêmement glauque et morbide, il faut y goûter.
Maintenant, malgré une plume fluide, l’auteur est très très incisif. Rien n’est laissé au hasard et l’horreur y est peinte, non feinte.
Si, comme moi, votre estomac est un peu trop fragile, vous pouvez opter pour l’adaptation ciné qui suit relativement bien l’écrit malgré quelques différences. Pour ma part, je l’ai trouvée bien faite mais tout aussi choquante : pas de bande son (aucune !), des scènes coupées à l’écran noir, un rythme effréné entre les gros plans et les éloignés… Bref, bien mené et haletant. Quoiqu’il en soit, il faut être accroché dans les deux cas ! 🙂
Je n’ai pas eu là de coup de cœur, mais je pense qu’on en n’est pas si loin, il va falloir que je me jette corps et âme dans la lecture d’un autre de ses écrits. Patrick Sénécal a le mérite, le grand mérite de nous faire réfléchir, de nous traîner dans les méandres de la noirceur humaine… Libre à nous d’oser y plonger : un choix compliqué mais auquel je suis prête à me donner.
Bonne lecture à tous ! 🙂