Le cheptel
Voilà les amis que je referme Le cheptel, de Céline Denjean. Quelques 650 pages de « bonheur » si j’ose.
Alors, que nous raconte-t-elle cette fois-ci ? Dans quelles méandres est-elle partie se perdre ? Ce livre est atroce et beau. Comme j’en ai pris l’habitude maintenant avec cette auteure, elle sait nous donner des frissons avec ce qu’il y a de pire mais aussi de meilleur en l’Homme. Tout est lié, le pire oui, mais par rapport à quoi et inversement. L’un n’existerait pas sans l’autre et elle mène une plume fluide et incisive avec brio pour nous le démontrer.
Au début, je me suis dit « y’a pas de suspense » et j’avais l’impression d’avoir compris l’histoire dans les premiers chapitres. Ce qui en soi n’est pas entièrement faux car l’intrigue laisse peu de place à l’imagination mais ça, c’est au début.
Nous avons donc là une communauté à part entière, qui se veut autosuffisante et qui nous entraîne dans une idée du monde particulière. Des jeunes « novices » qui ont un monde bien à eux et nous en font découvrir la beauté à travers leur chef mais aussi leurs récits. Nous avons donc aussi leur chef, une femme à la poigne de fer qui manie le gant de velours pour porter l’amour à son cheptel et lui donner tout ce dont il a besoin pour subvenir à ses besoins et à sa sécurité car oui, la sécurité est le mot d’ordre car ce cheptel est soumis à des rafles de boches.
En parallèle, nous avons des cadavres (parce qu’on est bien d’accord, un livre sans cadavre n’est pas un livre 😉 ). Ce qui nous emmène alors dans les confins d’une gendarmerie dont on va bien évidemment suivre de près l’enquête.
En parallèle encore, nous avons l’aventure d’un jeune adolescent qui, par défi lancé par son frère, va chuter dans un torrent, qu’adviendra-t-il de lui ?
Enfin, nous avons Louis, un septuagénaire fort sympathique et somme toute en grande forme qui part à la recherche de ses aïeux. Ancré dans un passif qu’il veut comprendre, il découvre peu à peu qui il est et quelles sont ses origines.
En voyant tout ce petit monde, chapitre après chapitre, je pensais réellement que l’auteure voulait nous perdre et puis, non. Là encore, une main maligne nous guide tout du long : tantôt elle s’adresse à son personnage, tantôt elle en parle à la troisième personne et tantôt à la première. Vous ne savez plus où vous en êtes ? Plus sur quel personnage est centrée l’intrigue ? Hop là, elle vous remet dans le bain en quelques mots et ça, c’est classe !
Les personnages sont très travaillés, encore une fois, on assiste à la décortication des caractères, des besoins et des émotions de ces derniers. Tout est reflété sans tomber une seule fois dans le mièvre ou le « trop ». Seule redondance trouvée était pour les besoins de l’enquête, ce casse tête infernal dans lequel est plongée la brigade de gendarmes. Du coup, cette redondance (ressenti personnel) était plus que nécessaire pour montrer cette urgence, cette impression de trépigner, de ne pas savoir par où prendre les choses. Bref, même ce qui aurait pu paraître être un défaut est au final une qualité, une façon de faire comprendre au lecteur qu’on est coincé mais sans le barber…
Du coup voilà, comme je le disais, j’avais l’impression d’avoir compris l’idée mais je ne pouvais pas m’empêcher de tourner les pages pour autant tant l’écriture est prenante, le style est fluide, les descriptions sont présentes, l’ambiance est posée. Bref tout y est et c’est un régal. Puis, il y a la fin ! OMG, cette fin ! C’est aux dernières pages que j’ai le cœur lourd et… c’est dans les dernières pages qu’on comprend la « beauté » de tout ça. On a là encore de l’héroïsme, des vrais morceaux de méchants, mais aussi une envie folle de croire que rien n’est jamais fini et que tout reste à gagner, qu’on a toujours oui TOUJOURS quelque chose à perdre.
Bref, ce livre est une guerre, et quelle guerre…
Du suspense m’sieur dame, vous en voulez ? Je vous laisse donc ouvrir ce bouquin, vous pourrez difficilement le lâcher avant la fin. Une véritable mise en avant des dangers de la manipulation des masses, de la peur comme arme, tout ça sur fond de guerre (qui reste le décor « principal »). Cette course poursuite contre la montre, la mort et… pour la vie est vraiment bien menée ! Profitez !
Voilà que je termine sur ces quelques mots : j’espère vraiment de tout cœur que le prochain opus est une suite… tout ça me laisse une grosse faim ! Du coup, encore une fois, merci Céline. Je m’excuse pour ce pavé mais… à la taille du bouquin, je me dis que j’ai le droit 🙂 et… je vais m’attaquer à la fille de Kali (parce que je n’aime pas les conventions : lire dans l’ordre, c’est chiant 🙂 ) en attendant avec impatience le prochain !